


ART-THERAPIE ET RELATION
C’est d’abord sous le regard de ses parents que le moi psychique humain se constitue, et c’est dans les relations avec eux qu’il se conforte ou se déforme. Le célèbre « stade du miroir » de Lacan explicite le processus « d’assomption jubilatoire du moi » dans la construction d’un moi psychique distinct, quand la mère regarde l’enfant et qu’il se voit regardé par elle dans le miroir. Et toute la psychanalyse montre comment les carences ou accidents relationnels obligeant à construire des systèmes de défense sont à l’origine de la plupart des pathologies psychiques.
C’est aussi par le langage et la symbolique que la psyché spécifiquement humaine se constitue à partir de la relation aux parents et de leur propre parole. Il s’agit bien de construire une identité de sujet parlant. La psyché humaine est donc d’abord relationnelle et ne peut se nouer ou se dénouer que dans une relation.
Les différentes techniques psychothérapiques et en particulier l'art-thérapie ne vont intervenir que comme des « ouvre-boîtes » pour permettre l’instauration de cette relation transformatrice. Cela fonctionne quand l'accompagnant crée une qualité relationnelle d’abord faite de l’intensité de sa présence, de son ouverture à l’altérité et de sa forme d'être, même s'il intervient peu. Mais la parole, en particulier celle de la personne accompagnée, doit toujours trouver sa juste place pour qu'advienne le sujet parlant.
Ce ne sont évidemment pas les diplômes universitaires officiellement reconnus qui donnent cette aptitude à l'accompagnant, mais le travail de rencontre de son propre inconscient exercé sur lui-même et nommé par lui, ainsi que la formation pratique impliquante dans laquelle il a pu s’engager. Dans l'art-thérapie en particulier, et dans l'art transformationnel, cette qualité de présence transformatrice s'appuie aussi sur la relation de l'accompagnant à sa propre créativité, sans laquelle la personne qu'il accompagne ne peut pas rencontrer la sienne ou, si elle la rencontre, ne peut pas s'en servir pour sa transformation parce qu'elle se situerait hors d'une relation d'être créateur à être créateur, relation qui est en soi réparatrice.
Yves Lefebvre