



Comme chaque mois, il vous est proposé un écrit d’un parent d’enfant malade psychique. Voici ici le texte d’une mère sous la forme d’un exercice d’écriture où chaque phrase commence par « Je me souviens ». Ce texte nous parle de l’impuissance de l’amour d’une mère, et de la violence de la maladie, mais également, de la dictature des « psy » qui disent être là pour accompagner, mais qui dans leur propos sous-entendent, (en tout cas c’est souvent perçu comme cela par les parents), qu’ils sont coupables de la maladie de leur enfant. N’oublions donc pas ce qui nous a conduits à pratiquer notre travail d’accompagnement de personnes souffrantes et gardons à l’esprit que seuls la bienveillance peut aider l’autre.
Mylène BERGER
Juillet 2013 - Texte de Madame MZ.
Je me souviens de sa première et dernière séance d’équitation, je devais le reprendre au bout d’une heure, il n’y était plus, il est rentré à pied, dix kilomètres…
Je me souviens de la conférence d’un psychiatre, il a proposé de répondre à nos questions. Oui madame, en cas de problème avec votre ado, n’hésitez pas à nous contacter, vous serez reçue et on vous trouvera des solutions…
Je me souviens lui avoir adressé ma demande deux ans plus tard, hélas je n’habite pas dans son secteur. Allez voir monsieur X… Je ne pourrai pas, c’est celui là qui m’a jugée mauvaise mère dix ans auparavant quand je lui ai parlé autisme pour ma fille.
Je me souviens de la mauvaise foi du personnel du CMPP qui m’accusait de mal faire alors qu’eux-mêmes la faisait pleurer.
Je me souviens d’une cerise sur le gâteau, c’était ma fille dans les propos de son psychologue qu’elle rencontrait chaque semaine.
Je me souviens des soubresauts de mon fils sur un lit d’hôpital à l’âge de cinq ans, la jambe en extension à cause d’une fracture déplacée au fémur.
Je me souviens de son retour de colonie en école de cirque où il était devenu un as de l’acrobatie.
Je me souviens de ce beau piano qui a trôné six mois dans notre séjour, comme j’étais fière.
Je me souviens de ma mère qui m’accusait de trop le gâter !
Je me souviens de la gêne ressentie à chaque démarche avec un de mes enfants, jamais comme les autres…
Je me souviens de son quatrième anniversaire où sur sa demande j’avais invité tous les garçons de la classe, un seul est venu juste avant son déménagement ! Fatalité, première désillusion ;
Je me souviens des radis qu’il faisait pousser dans son petit jardin, il ne voulait rien perdre et voulait faire de la soupe avec les fanes.
Je me souviens des bonbons que l’aînée et le plus jeune ont mangé dans un recoin de la grande penderie, j’ai retrouvé les papiers, je pense aujourd’hui que je devais être bien sévère pour qu’ils s’isolent ainsi !
Je me souviens qu’elle lui a dit de se méfier des deux filles de mes amis venus passer une soirée et la nuit chez nous. Nous n’avons pas pu obtenir qu’ils jouent ensemble ;
Je me souviens des biscuits confectionnés tard le soir car c’était une recette de la prof d’allemand à rendre le lendemain. Ils sont restés huit jours dans le cartable. Plus tard j’ai su qu’elle avait blagué en proposant de faire les biscuits pour son anniversaire. !
Je me souviens que lorsqu’il se mettait en colère, ce petit bonhomme nous faisait rire avec ses grands gestes.
Je me souviens du judo, du basket, du tir à la carabine, de la natation, de l’escalade, tout ce qui n’a duré qu’un ou deux ans après les désillusions lors des compétitions.