


UN EXEMPLE DE COURAGE
Comme la chèvre qui grimpe la montagne,
Elle a lutté, douté, avancé.
Elle a failli être engloutie par le loup
mais au final,
elle a gagné sa liberté
après trois années de thérapie.
Nous nous sommes dit au revoir. Le jugement de divorce ayant lieu fin mars, elle partira le jour même rejoindre son amour de jeunesse dans le sud de la France.
J’étais très émue et franchement fière de la voir autonome décidant de sa vie après 27 ans de mariage avec un homme qu’elle n’a jamais aimé mais dont elle n’arrivait pas à se séparer.
Nous sommes en janvier 2009, je ne suis installée que depuis 2 mois.
Elle arrive en disant : « C’est Mme C qui m’a dit de venir vous voir. »
- « Qu’en pensez-vous ? »
- « Elle dit que j’ai un problème avec les hommes. »
L’histoire montrera qu’elle avait un problème avec UN homme, son mari qui la maltraitait, l’humiliait, la forçait à avoir des relations sexuelles. Femme de paysan, elle travaillait bravement, courageusement supportant les remarques acerbes et dévalorisantes. Quoiqu’elle fasse, quoiqu’elle dise, elle ne valait rien, pas même un salaire alors qu’elle faisait partie de la société agricole. Elle « coûtait » déjà bien trop cher à s’acheter quelques bricoles. D’ailleurs dans une lettre de découragement apportée en séance, elle avait écrit … « travailler comme un bête 365 jours par an ! »
Et comme souvent en agriculture: les parents veillent !!!
Le petit garçon n’ose pas se révolter et encore moins défendre son épouse ! Non la loyauté est plus forte !
Mme L a été terrassée par un AVC quelques années plus tôt et est tombée d’un premier étage l’année suivante en repeignant des volets. Il y a 3 ans, elle était perdue, ne sachant plus si elle devait croire ce qu’elle entendait au quotidien. Chez ces gens là, pas de compassion, pas de plainte, elle n’est rien. Tout leur appartient.
Son corps n’en peut plus et sa tête non plus, elle cherche ses mots (séquelles de l’AVC). Elle arrive bien souvent exténuée en séance. Evidemment lorsqu’elle me parle agriculture, je peux tout à fait échanger, elle se sent en confiance.
Les mois défilent, elle viendra courageusement et régulièrement toutes les semaines.
Après son départ, je retrouve des photos que nous avions dû faire ensemble. Ce n’est pas possible…ce n’est plus la même femme ! Je n’y crois pas……. Incroyable. J’avais presque oublié tant elle est devenue confiante, souriante, épanouie et s’en va avec des projets plein la tête. Elle arrive même à dire à propos de son fils de 20 ans encore chez son père : « Il fera sa vie, lui aussi. »
Enfin avant de partir, elle demande si elle pourra m’appeler en cas de besoin.
Volontiers ! Mais je la vois désormais suffisamment solide et surtout bien accompagnée pour savoir qu’elle volera de ses propres ailes et n’aura plus besoin.
Noëlle MESUREUR