


VINGT ANS !
Le douze janvier mille neuf cent quatre-vingt quinze Joëlle Cornelisse-Saigre et moi déclarions à la Préfecture de l’Yonne le Mouvement d’Art-Thérapeutes, devenu en mille neuf cent quatre-vingt dix neuf le Mouvement d’Art-Thérapie.
Le douze janvier deux mille quinze, ce que tout le monde s’accorde pour appeler le MAT aura vingt ans.
Lors je le quitterai.
D’aucuns s’imaginent que, ce faisant, je signe son déclin, voire son arrêt de mort !... Ils se trompent lourdement. Outre que l’équipe en place a déjà fait ses preuves, les nouveaux programmes, résolument orientés sur l’art transformationnel, favorisent des engagements plus résolus car plus clairs, ne nécessitant plus d’avoir à faire le grand-écart pour concilier des paradigmes difficilement conciliables. En revanche ce qui serait fatal au MAT serait de vouloir revenir à de tels amalgames.
Il a fallu du temps pour arriver à cette inscription déterminée dans le courant existentiel et reconnaître la prévalence de l’imagination créatrice et ce qui la différencie de l’imagination associationniste. Enfin nous y sommes, ou presque. Je peux me retirer satisfait car c’est ce que je voulais. Tel est la part d’héritage que je désirais laisser.
Mais il est évident que si le MAT est ce qu’il est en train de devenir aujourd’hui, c’est le résultat de l’effort de chacun. Comment ne pas associer à son devenir tous ceux qui, de près ou de loin, y ont œuvré ? Et d’abord nos compagnons des premiers jours que Joëlle et moi avions convié à partager l’aventure et dont la plupart sont toujours là, les Danielle Dézard, Marie-Hélène Dumont, Manuel Garcia-Barroso, Yves Lefebvre, auxquels sont venus se joindre, issus de la première promotion Valérie Bascoul, Marie Meerson et Yamina Nouri. Comment ne pas nommer ceux et celles qui, au cours des promotions, se sont résolument et pleinement engagé, au sein du CA, des commissions, et dans la transmission : Frédérique Astruc, Nicole Derda, Anne-Laure Letondoz, Rosario Orenes-Moulin, Irmela Schramme-Bluche… Comment ne pas avoir une pensée reconnaissante pour ceux qui, un temps, ont beaucoup donné, et puis se sont retirés ? Eh oui, les incompréhensions font aussi partie du mouvement… mais elles n’ont pas le pouvoir de l’arrêter. Voici venir les forces vives de cette quinzième promotion qui vient de se terminer, les Christophe Ramond, les Michèle Régade… Et puis il y a encore celles et ceux qui dans les régions animent notre action, les Anne Auriault, Mylène Berger, Lyzanne Bred, Fabiola Harlon-Goffredi, Christine Ledanois, Françoise Poulnot… Mais il me faudrait les citer presque tous… aussi bien je demande à ceux que j’oublie de ne pas m’en tenir rigueur. J’arrête donc ce panégyrique, mais sans pour autant tomber dans le dithyrambe, je veux dire toute ma reconnaissance à Joëlle, sans qui cette belle aventure n’aurait pas existé.
Enfin que tous soient remerciés d’avoir partagé les bourrasques inhérentes aux traversées au long cours, mais aussi d’avoir supporté les « colères du capitaine », peut-être parce que chacun savait qu’elles n’étaient que l’expression d’un amour exigeant, quand il se voit freiné dans l’intensité de son déploiement.
Quitter n’est pas rien, surtout lorsqu’est venu le temps des premières récoltes… Quitter, c’est bien sûr se libérer d’une obligation, mais je n’ignore pas que laisser en s’éloignant c’est renoncer à… Le MAT irait fort mal s’il se figeait dans le respect des visées de ses fondateurs. C’est pourquoi je souhaite aux équipes montantes de garder l’esprit qui nous anime : sans cesse déconstruire non pour faire marche arrière mais pour reconstruire autrement, pour transformer. Je sais que Yamina Nouri, votre nouvelle présidente, y veillera, et je me réjouis d’avance de voir, sous sa houlette, se profiler des grands chambardements.
De mon côté, en mi retiro, je vais pouvoir me centrer sur la recherche, car cet art transformationnel a encore à faire ses preuves, et pour cela il faut imaginer et créer les outils qui lui seront nécessaires. Ce ne sont pas les idées qui me manquent. J’ai l’intention de les transmettre à ceux qui voudront s’en saisir, sans réticences, afin de les exploiter sans les édulcorer. Ceux-là, qu’ils soient membres du MAT ou non, savent que cela ne pourra exister qu’à partir d’une entière indépendance d’esprit quant aux autres approches. Il ne s’agit pas de réformer ce qui existe déjà, il s’agit de créer autre chose qui, à ce jour, n’existe pas encore. En cette matière : « Dime con quién andas, decirte he quién eres » Tel est l’avis de Don Quijote. Il me convient pleinement.
Henri SAIGRE